Hommage aux gens de la terre

« Quand les ombres s'allongent », deuxième roman de Roger Faindt : naturaliste.

Un homme qui cherche le pays des larmes, un buisson qui parle, une corneille philosophe... ça commence comme un conte fantastique. Début lent comme la démarche d'une âme en peine et le lecteur se demande bien où Roger Faindt veut l'emmener.

A Miserey, tout simplement, pas très loin donc, et passée cette ouverture en adagio, prend forme une symphonie volubile et poétique des mots et d'images à la gloire des gens de la terre.
Roger Faindt avait exploré le futur avec son premier roman « Le souffle du passé », il remonte le temps avec le deuxième « Quand les ombres s'allongent ».
On pourra lui reprocher son titre pas très engageant mais il faut ouvrir ce livre et s'y plonger.
Le temps et la modernisation n'ont pas fait complètement disparaître ces hommes et ces femmes « qui regardaient davantage la terre que le ciel» et dont certains sont des proches, des amis, des parents.
 


Roger Faindt avoue humblement « qu'écrire pour le lecteur c'est plus facile à dire qu'à faire » mais il y parvient, faisant partager avec bonheur son souci du détail et de la précision.
Ses personnages ont une histoire, une épaisseur et il a su utiliser les mots qui à ses yeux sont « les plus beaux », ceux du quotidien. C'est plein de dictons francs-comtois, c'est plein de la vie des paysans d'autrefois. C'est plein de non-dits, de secrets, de regards en coin... et de ce qui semble bien constituer l'obsession de Roger Faindt : la difficulté d'accepter la différence. Filigrane du premier roman, le thème est donc récurrent : l'autre n'est pas forcément le bienvenu, l'étranger est forcément étrange et c'est de cela bien sur que souffre le héros.

Une sorcière qui fait le malheur, une sourde-muette qui fait des poupées, une famille qui cultive le secret... et ce voyageur qui voudrait hier savoir et dont les questions dérangent.
Il est étranger et le voilà qui s'intéresse aux autres, aux différents. Oh, là là, que de coups de pieds dans le train-train !

Pierre, l'homme qui cherchait le pays des larmes, trouvera-t-il la paix ? Et si c'était par lui, finalement, que cette paix arrive ? D'ailleurs, ce voyageur pourrait ressembler un peu à l'auteur... Toute fable a sa morale et celle-ci ne fait pas exception. Y parvenir au bout de tant de marches à travers la campagne est un vrai bonheur.

Jean-Pierre GOVIGNAUX. L'Est Républicain. Juin 1997
Aux Editions Caracter's à Besançon. Dans toutes les bonnes librairies.