Comprendre, Conversation, Créativité
Comprendre
Pour les humains, la compréhension augmente avec l’invention successive et l’affinement des outils que sont les sens, les gestes, la parole et l’écrit.
Comprendre le monde est devenu aujourd’hui la capacité à expliciter les phénomènes par les mots, qu’ils soient prononcés, écrits ou seulement pensés.
La compréhension permet à l’évidence d’orienter les décisions. Cette démarche est si efficace qu’aujourd’hui, nous voulons tout comprendre. Tout phénomène stable ou récurrent semble pouvoir être déduit d’un enchaînement logique.
Il y a trois domaines principaux où nous nous efforçons d’augmenter notre compréhension : le monde minéral, la vie et la psychologie.
Au 20e siècle, les avancées dans les deux premiers domaines ont été considérables. C’est le 3e domaine qui reste lacunaire, en particulier pour la relation entre les motivations individuelles et le fonctionnement neuronal.
Les sous-domaines de compréhension sont si nombreux que la spécialisation a pris de l’ampleur. L’excès de spécialisation provoque un manque de compréhension générale dommageable pour l’individu aussi bien que pour la collectivité. Sans vue synthétique, les décisions sont prises en fonction des rapports de force des spécialistes.
Accéder à un niveau de connaissance équilibré entre les trois domaines de compréhension – de la matière, des êtres vivants, et de l’individualité – pourrait être un objectif éducatif.
23 novembre 2015
Conversation
Le développement neuronal permet l’invention successive de quatre outils : les sens, les gestes, la parole et l’écrit. Si les sens et les gestes sont universels chez tous les animaux, la parole est la première grande invention de l’humanité. Son émergence est relativement récente puisqu’elle daterait d’environ 100 000 ans.
Aujourd’hui, la parole se développe jusqu’à l’art de la conversation qui devient en quelque sorte la clé de voûte de notre édification sociale.
La conversation commence dans la famille, se poursuit dans la collectivité et atteint une plénitude dans l’individualité. Ainsi, trois modes de conversation en gigogne peuvent être définis : familiale, collective et individuelle. On se rend compte qu’il est prudent de n’aborder dans les deux premiers modes que ce qui les concerne.
La conversation familiale relève surtout de la vie quotidienne, des enfants, des événements familiaux, de la maison. La conversation collective s’élargit aux professions, à la politique et à l’économique. La conversation individuelle accède aux explorations personnelles.
L’amitié est le lieu privilégié de la conversation individuelle. Le dialogue amical permet une sélection des problématiques les plus intéressantes et une recherche des décisions les meilleures, si possible en lien avec ce qu’on lit ou écrit.
Chacun gagne à attacher la plus grande importance au temps qu’il accorde aux conversations et aux thèmes de ces conversations où l’on doit équilibrer l’affectif, l’informatif, le raisonnement, le divertissement.
30 novembre 2015
Créativité
Le hameau, le village, la ville et leurs liens sont l’entier résultat de notre activité. Nous sommes entourés de notre savoir-faire. La recherche d’améliorations y est permanente, commencée il y a des centaines de milliers d’années avec l’affinement des gestes, puis avec l’émergence de la parole.
Une accélération s’est produite lors de l’invention de l’écriture il y a cinq à six mille ans. Une accélération de quoi ? D’une aptitude fondamentale : la transmission, qui implique la mémorisation.
Dans le vaste champ des essais et des explorations, l’amélioration est ce qui va être conservé pour et par la transmission.
L’organisme animal fonctionne parce qu’il trouve une habitude de vie suffisamment efficace pour se nourrir et se reproduire. Mais cette habitude ne surgit pas de nulle part, elle est le résultat d’un incessant balancement entre le familier et le nouveau.
De sorte que la créativité résulte du fonctionnement même des neurones. C’est ce que nous avons appelé l’inventus neuronal pour compléter l’idée d’habitus neuronal récemment proposée par le biologiste Jean-Pierre Changeux. Chaque individu et chaque groupe bénéficient de l’inventus neuronal car il s’agit d’une aptitude corporelle.
La sociabilité humaine consiste alors à mémoriser et transmettre la part jugée positive des créativités pour rechercher une suite ou des variantes à chaque cheminement collectif.
12 octobre 2015